Eléments de réflexions et témoignages sur le sacrement de Réconciliation

 Réconciliation

 

Actuellement, le sacrement de réconciliation est dans une situation pour le moins singulière. Une forme remporte l’adhésion des fidèles, c’est la célébration collective avec absolution collective. Une autre forme, la démarche individuelle est suivie par un très petit nombre de personnes. Là où les deux formes sont proposées, la première rassemble dix fois plus de personnes que la seconde.
Cela ne serait pas gênant si la célébration collective n’était pas « interdite » par la hiérarchie catholique et la démarche individuelle seule autorisée.

Comment expliquer ce paradoxe ?
Nous vous proposons quelques éléments, très simples, très limités mais qui peuvent peut-être amorcer une réflexion.

 

Pour l’Église Catholique.

 

« Ce sacrement est le signe de l´amour infini de Dieu. Le pardon de Dieu est toujours possible, si nous faisons une démarche vraiment sincère. En se reconnaissant pécheur, nous croyons que l´Amour infini de Dieu est toujours le plus fort. Le dialogue avec un prêtre est le signe efficace de la réconciliation avec Dieu et avec nos frères… Le prêtre « remet en route » la personne lorsqu´il pardonne les péchés, au nom du Christ. »

 

Si nous regardons du coté du peuple de Dieu.

 

Certains rêvent de revoir un jour les queues qui se formaient devant les confessionnaux avant le concile Vatican II. Ils pensent qu’à l’époque les chrétiens avaient encore le sens du péché et qu’ils l’ont perdu. Des obligations strictes les aident à cheminer vers Dieu. Pour eux, un contact régulier et personnel avec un prêtre est positif, voire indispensable.
D’autres, au contraire, ont gardé un très mauvais souvenir des confessions d’autrefois qui leur ont laissé un arrière-goût de pouvoir et de contrôle. Ils ne veulent pas revenir au système assez coercitif sur lequel l’Église s’est beaucoup appuyée pendant des siècles. Cela leur semble contraire à l’esprit de l’Évangile où ils trouvent une parole de libération.
D’autres encore, constatent que dans les évangiles toute faute reconnue, assumée est immédiatement pardonnée.
Beaucoup sont conscients que tout péché ne relève pas forcément du sacrement de Réconciliation.
D’ailleurs, est-ce que l’Église dit vraiment que le pardon de Dieu ne peut se recevoir que par le sacrement de Réconciliation ?
Surement pas. Par contre, elle le laisse parfois croire.
D’ailleurs, la liturgie Eucharistique comporte de nombreuses demandes de pardon faisant ainsi une place au pardon en dehors du sacrement de réconciliation.
De très nombreuses prières de demande de pardon sont proposées par tous les canaux utilisés dans l’Eglise. Cela élargit encore cette possibilité de pardon en dehors de tout sacrement.
En bonne théologie, les sacrements sont faits pour nous. Pour nous aider à recevoir la grâce de Dieu. Surement pas pour lui permettre de la donner. C’est nous qui avons besoin de gestes concrets.
Une autre piste serait à éclaircir celle de l’accompagnement spirituel et du lien entre accompagnement spirituel et sacrement de réconciliation. Ce sont deux choses différentes qui peuvent se rejoindre mais pas nécessairement. De plus en plus de laïcs font, de fait, de l’accompagnement spirituel. D’une certaine façon lors de la préparation des sacrements mais aussi dans les hôpitaux ou lors des funérailles. Mais c’est vrai aussi sans circonstances particulières, d’ailleurs l’Eglise propose aux laïcs des formations à l’accompagnement spirituel.

D’autres formules apparaissent aujourd’hui. Le deuxième témoignage ci-dessous raconte une de ces célébrations. Une démarche de réconciliation est proposée à tous avec une première partie en groupe suivie ou non d’une demande individuelle d’absolution. C’est peut-être une façon de concilier une approche collective et le sacrement lui-même qui resterait individuel.

Témoignages sur le sacrement de réconciliation

 

Premier témoignage François périphérie Nantaise

Je suis partagé entre 2 paroisses.
L’une assez « tradi » a laissé tomber les célébrations communautaires (avec aveu individuel) au profit des confessions individuelles comme autrefois : on ne peut pas dire qu’il y a affluence !
L’autre paroisse voisine, plus ouverte, privilégie les célébrations communautaires, aux approches des grandes fêtes liturgiques (3 ou 4 par an), avec un questionnaire très bien préparé par l’équipe pastorale, à partir d’un passage d’Evangile, bien choisi et qui varie chaque fois. Il y a 2 célébrations, l’une en après-midi, l’autre le soir pour permettre à tout le monde d’y participer et en 2 lieux de culte différents : on peut dire qu’il y a de la participation et c’est très recueilli. Il n’y a pas d’aveu individuel mais une démarche en procession vers la Parole de Dieu ou vers l’eau du Baptême ou le Cierge pascal, avec une absolution collective à la fin.
S’il fallait donner mon avis, je dirai clairement que la deuxième formule me convient parfaitement et que, jamais, je ne reviendrai à la confession individuelle telle que je l’ai pratiquée trop longtemps et que certains voudraient rétablir.

François périphérie Nantaise

 

Deuxième témoignage : Fête de la réconciliation, 5 avril, à Notre Dame de toutes Aides

« Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu »
Un groupe de 40 à 50 personnes (adultes et enfants) est accueilli au fond de l’église dans un climat de silence (guitare : car tu es mon père, je m’abandonne à toi), invité par un laïc (berger + bâton) à se signer de l’eau du baptême et à s’asseoir au pied d’une projection (élément de la splendide croix du CCFD 2014)
Le chant et le psaume 22(le Seigneur est mon berger) accompagné de belles photos nous font entrer dans la confiance, et le repos de Dieu.
A la suite de notre guide nous suivons un chemin traçé au sol pour revenir à l’essentiel : au pied de la croix du CCFD, nous nous prosternons, chantons, gestuons le psaume 94 (crions de joie…acclamons notre rocher…adorons le Seigneur…ne fermez pas votre cœur comme au désert)
Un cœur fermé nous est remis pour l’étape suivante où dans une méditation personnelle à l’aide du livret donné à l’entrée nous chercherons quelle attitude nouvelle pour nous va permettre d’ouvrir son cœur). Psaume 50
Les enfants sont pris à part.

Chacun prend le temps qu’il veut pour la contemplation, méditation ; puis est invité à choisir un, plusieurs ou tous les gestes proposés :

  • Donner son « cœur » rempli au prêtre pour le sacrement de la réconciliation,
  • Se signer à la vasque d’eau parfumée (+ pétales de fleurs) « je répand le parfum sur ma tête ; ma coupe est débordante »,
  • Il y a un bâton de marche fiché dans du sable « ton bâton me guide et me rassure »,
  • Ensuite on peut placer notre cœur sur le grand cœur coloré,
  • Déposer une votive au pied du cœur.

Chacun sort discrètement quand il le souhaite. Des vêpres clôturent l’après midi.

J’ai beaucoup apprécié ce temps où un peuple (adultes, enfants) se retrouve dans la confiance la paix, la joie pour se laisser aimer pas son Dieu.
L’organisation minutieuse et légère pour le participant crée un climat de méditation.
Un bémol pour la succession des groupes toutes les demies heures qui « bruite » un peu le temps où on aimerait plus de silence.
Les prêtres discrets participent de la liberté de chacun.

Évelyne

Compléments du mois d’avril 2015

Le groupe « écouter » de CCB44 a poursuivi sa réflexion sur la Réconciliation et souhaite ajouter des éléments à sa première publication. Nous ne prétendons pas faire de théologie, encore moins épuiser le sujet, nous vous livrons simplement quelques jalons supplémentaires dans notre cheminement.

Dans l’Évangile, la rémission des péchés est essentielle. Elle est directement associée au salut. Les deux vont de pair. L’un ne va pas sans l’autre. C’est une évidence qui ne semble pas posée le moindre problème aux rédacteurs des évangiles. Cela nous interroge sur la relative désaffection du sacrement de la réconciliation. Cela peut nous questionner sur notre conception du salut, sur notre conception du péché. De quoi voulons-nous être sauvés ?

Si nous revenons à la pratique du sacrement, nous voyons que la démarche individuelle a l’avantage de faire circuler une parole entre celui qui reçoit le sacrement et le prêtre qui le confère. Pour nous qui, avec la CCB, voulons libérer la parole dans l’Église ce n’est pas indifférent même si nous sommes sur un autre plan.

En nous rappelant que le sacrement est fait pour nous, que nous avons besoin de signes concrets, nous pouvons penser qu’un contact personnel peut être un signe plus tangible de l’amour de Dieu. Le prêtre est signe de Jésus-Christ miséricordieux. Mais il y a sans doute des conditions pour que cela se fasse.

Nous avons réalisé qu’en disant que le pardon de Dieu ne passe pas uniquement par le sacrement, nous posons, en fait, la question du rôle du prêtre.

Quelle est sa place ? Peut-on se passer de lui ? Est-il un passage obligé, exclusif ? A quoi sert-il ?

A distribuer les sacrements ? A être le garant du dogme, de la conformité à l’enseignement de l’Eglise ?

Deux exemples nous semblent intéressants : d’abord celui de l’accompagnement des familles en deuil dans nos paroisses, ensuite celui des aumôneries d’hôpital et du sacrement des malades.

L’accompagnement des familles en deuil est majoritairement assuré par des laïcs. Mais, d’une part certaines familles souhaitent une eucharistie et d’autre part les prêtres veulent garder un contact avec les personnes en deuil et les funérailles.
Certains prêtres choisissent de laisser aux laïcs la conduite de la célébration et se limitent à célébrer l’eucharistie en laissant même l’officiant laïc commenter les textes qui viennent d’être lus.

D’autres, au contraire, trouvent que cela reviendrait à trop limiter leur rôle. Ils ne veulent pas être réduits à une place de distributeur de sacrement auquel on est obligé de faire appel. S’ils célèbrent l’eucharistie lors de funérailles, ils veulent avoir eu un contact, même limité, avec la famille, ils souhaitent être clairement l’officiant de la célébration. Cela ne les empêchent pas de garder une place pour les laïcs, qui vont, par exemple, évoquer le parcours du défunt, lire des textes, animer les chants.

A l’hôpital aussi, les visites régulières sont le plus souvent assurées par des laïcs. Il arrive qu’une personne suivie depuis plusieurs semaines demande le sacrement des malades. L’aumônier laïc doit faire appel à un prêtre qui vient au chevet de la personne qu’il n’a jamais vue. Selon la façon dont le contact se fait, selon la manière de présenter la démarche, la venue du prêtre peut être vécue par le malade ou ses proches comme quelque chose de complètement déconnectée du vécu précédent ou au contraire comme une étape qui s’inscrit harmonieusement dans le cheminement du malade.

Dans les deux cas, les prêtres et les laïcs trouvent leur place lorsqu’ils travaillent ensemble, réfléchissent à leur action, se coordonnent et ont le souci de bien expliquer ce qu’ils font ensemble.

Il est sans doute important qu’il n’y ait pas d’enjeu de pouvoir ni pour les laïcs, ni pour les prêtres, que la question soit claire, que les délégations données aux laïcs soient explicites.

Il faut sans doute bien distinguer pouvoir et autorité. Autant le pouvoir, sur les personnes en particulier, n’a pas de place dans les sacrements. Autant l’autorité, exercée avec beaucoup de délicatesse et de discernement, est légitime.

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